Un Levi’s 501 bleu délavé, déchiré, soutient ses jambes. À leur bout, une paire de Reebok blanches. Entre celles-ci et le sol chauffé à blanc par un soleil ardent, une planche de skateboard.
Il met ses écouteurs à arceau, s’assure que son Walkman Sony Sports est bien fixé à la ceinture de son denim, enclenche la touche de lecture et la cassette commence à défiler.
Voilà Slash qui décoche 1000 volts de sa guitare, l’électrifiant en un instant, lui insufflant le courage nécessaire pour affronter la descente de l’enfer, cette pente légendaire du quartier du Belvédère à Casablanca. De terribles courants d’air l’habitent, pouvant, en un clin d’œil, désarçonner même le véliplanchiste le plus aguerri aux vents rageurs d’Essaouira.
Loaded like a freight train
Flyin’ like an aeroplane
Feelin’ like a space brain
One more time tonight
Et le voilà qui file, chevauchant sa planche et la liberté, sentant son sang pulser dans ses veines. Il est présent au monde tout en étant entièrement détaché, lévitant dans l’insouciance de sa jeunesse.
I can never get enough
I’m on the night train
Never to return – no
Loaded like a freight train
Son corps est pris de soubresauts, faisant écho à ceux de sa planche qui tolère mal la prise soudaine de vitesse. Fléchir les jambes, descendre son centre de gravité, étendre les bras. L’équilibre ou le crash.

Mais peu importe. Le futur n’existera que tout à l’heure. Tout ce qui compte c’est l’instant, le présent.
C’est maintenant qu’il faut vivre. Pas demain.